C’est la fête des mères. Christine et Dominique regardent Tortuga. Cheveux aux épaules, en queue de cheval. Géraldine pleure ou bien non. Se perdent jusqu’aux muscles du visage, cette émotion de dire au revoir aux siens sur un ponton de port comme un drôle de quai de gare. Julie, Laure et Garance sont assises sur la pierre du quai, un peu en hauteur, les pieds dans le rien. Mes trois blondes. Nous n’avons pas assez d’heures pour s’étreindre assez. Il faut partir. Enfin on va partir. Le cœur en deux moitiés. Nous te gardons avec nous, Dona, Steph. Julia, Lolo, Hugo. Sabine. Et tous ceux qui n’ont pas pu venir. Géraldine et moi portons au poignet des bracelets dorés offerts par ceux qui ne veulent pas qu’on les oublie. On n’oublie pas. On part. Nos mères nous laissent à une autre et c’est la trouille d’un nouveau commencement. Un départ qui vaut pour arrivée : nous y sommes. On l’a tellement tourné dans nos rêves cet instant-là, qu’il en est tout usé de coton.
Tortuga s’éloigne du quai et je saute à bord. Une dernière étreinte, et c’est le détachement. Les amarres. La terre. L’écluse s’ouvre.
Océan.